Plusieurs mesures en matière de TVA et de taxe sur les salaires sont à relever.
Le Conseil constitutionnel ayant rendu sa décision (n° 2025-874 DC, 13 février 2025), la loi de finances pour 2025 a été publiée au Journal officiel du 15 février 2025 (L. n° 2025-127, 14 février 2025).
Voici les principales mesures de la loi concernant la TVA et la taxe sur les salaires. Une disposition du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 emportant des conséquences en matière de taxe sur les salaires mérite également d’être signalée.
GROUPE TVA ET TAXE SUR LES SALAIRES
Neutralisation du surplus de taxe sur les salaires résultant de la constitution d’un groupe TVA (LF 2025, art. 36)
Afin d’encourager le recours au régime de groupe TVA dans les secteurs de l’industrie et de la distribution, une exonération de taxe sur les salaires est instituée pour neutraliser les conséquences résultant de l’adhésion à un assujetti unique en matière de TVA par des entreprises qui, prises isolément, ne seraient pas soumises à la taxe sur les salaires. Rappelons que cette mesure avait déjà été adoptée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, mais qu’elle avait été censurée par le Conseil constitutionnel comme cavalier législatif.
L’article 231 A nouveau du CGI prévoit que les rémunérations versées par l’employeur membre d’un assujetti unique (CGI, art. 256 C) sont exonérées de la taxe sur les salaires lorsque les conditions suivantes sont remplies :
- cet employeur ne serait pas assujetti à la taxe sur les salaires s’il n’était pas membre de l’assujetti unique ;
- au titre de l�année civile précédant celle du paiement des rémunérations, le chiffre d’affaires des opérations réalisées par l’assujetti unique qui ouvrent droit à déduction est au moins égal à 90 % du montant total de son chiffre d’affaires imposable à la TVA.
Pour l’application de l’exonération au titre des rémunérations versées au cours de l’année civile de constitution de l’assujetti unique, la condition de chiffre d’affaires s’apprécie par référence au chiffre d’affaires de cette année civile.
L’exonération s’applique à la taxe sur les salaires due au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2026. Compte tenu des règles régissant l'option pour le régime de l’assujetti unique, l’application de ce régime à partir du 1er janvier 2026 suppose que l’option ait été formulée au plus tard le 31 octobre 2025.
La taxe sur les salaires n’est donc plus un obstacle au groupe TVA, ce qui implique de reconsidérer sa constitution dans des hypothèses et dans des secteurs (autres que bancaires et financiers notamment) nouveaux. De même, les calculs d’impact dans les groupes déjà constitués devront prendre en compte ce changement.
Aménagement de l’exonération de taxe sur les salaires des rémunérations des apprentis (PLFSS 2025, art. 7)
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, encore en cours d’examen par le Parlement à ce jour (examen en nouvelle lecture par le Sénat à partir du 17 février), prévoit une mesure relative à la CSG qui se répercute sur l’assiette de la taxe sur les salaires. En effet, les rémunérations imposables à la taxe sur les salaires sont celles retenues pour la détermination de l'assiette de la CSG (CSS, art. L. 136-1-1).
Le projet prévoit d'assujettir à la CSG les rémunérations des apprentis pour la part excédant 50 % du Smic. Par conséquent, pour les entreprises employant 11 salariés et plus, seule la part de la rémunération versée aux apprentis à hauteur de 50 % du Smic serait exonérée de taxe sur les salaires, alors qu’elle en était intégralement exonérée jusqu’� présent.
L’exonération spécifique de taxe sur les salaires prévue pour ces entreprises (CGI, art. 231 bis I, 3) demeurerait sans intérêt pratique puisqu’elle ne s’applique qu’� hauteur de 11 % du Smic.
La mesure s’appliquerait aux contrats d’apprentissage conclus à compter du premier jour du mois suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
TAUX DE TVA
Travaux dans les logements de plus de 2 ans : suppression des attestations des clients (LF 2025, art. 41)
Les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien réalisés dans des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de 2 ans sont soumis à la TVA au taux de 10 % (CGI, art. 279-0 bis) ou de 5,5 % s’il s’agit de travaux d'amélioration de la qualité énergétique (CGI, art. 278-0 bis A). L’application des taux réduits est subordonnée à la remise, par le client, »å’u²Ô±ð attestation visant à garantir que les conditions prévues sont remplies (modèle n° 1300-SD ou n° 1301-SD). Cette formalité représente une lourde charge administrative pour les entreprises, qui doivent collecter les attestations auprès de leurs clients et s’assurer de leur exactitude. Elle fait malheureusement l’objet d’un redressement habituel dans le secteur des travaux immobiliers, beaucoup d’entrepreneurs n’étant pas toujours en mesure de fournir l’attestation du client dans la forme en cas de contrôle.
Simplification attendue par les entreprises : l’exigence »å’u²Ô±ð attestation du client est supprimée et remplacée par une mention sur la facture ou le devis signés. Ainsi, le taux réduit est désormais applicable à condition que le client certifie sur le devis ou la facture que les travaux se rapportent à des locaux d'habitation achevés depuis plus de 2 ans et qu’ils ne consistent pas en des travaux exclus du taux réduit.
L’entreprise est tenue de conserver ces éléments à l'appui de sa comptabilité.
Le client doit quant à lui conserver une copie du devis, ainsi que les factures ou notes émises par l’entreprise, jusqu'au 31 décembre de la 5e année suivant la réalisation des travaux. Il est solidairement tenu au paiement du complément de taxe si les mentions portées sur le devis, les factures ou les notes s'avèrent inexactes de son fait.
Cette mesure entre en vigueur le 16 février 2025 (lendemain de la publication de la loi).
Application du taux normal à certaines opérations liées à la fourniture d’énergie (LF 2025, art. 20 et 32)
- La part « abonnement » des livraisons d’électricité ou de gaz est désormais soumise au taux normal de 20 % (au lieu du taux réduit de 5,5 % actuellement). Ce taux s’appliquera aux abonnements se rapportant à des périodes débutant à compter du 1er août 2025.
Seuls resteront soumis au taux de 5,5 % les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorifique distribuée par réseaux ainsi que la fourniture de chaleur produite au moins à 50 % à partir d’énergie renouvelable ou d’un processus dont l’objet n’est pas la production de chaleur.
- À compter du 1er mars 2025, la fourniture ou lâ€�installation »å’u²Ô±ð chaudière susceptible d’utiliser des combustibles fossiles est soumise au taux normal de 20 % et ne peut donc plus bénéficier d’un taux réduit au titre des travaux dans les logements de plus de 2 ans (10 % ou 5,5 % pour les appareils à haute performance énergétique). L’application des taux réduits est toutefois maintenue pour les opérations ayant fait l’objet d’un devis daté, accepté par les deux parties et ayant donné lieu à un acompte encaissé avant le 1er mars 2025.
Les travaux d’entretien ou de réparation des chaudières restent éligibles aux taux réduits.
- Dans le cadre de la réforme de la taxation des produits énergétiques et à une date qui sera fixée par décret, le taux de 13 % applicable aux ventes de produits pétroliers livrés en Corse sera supprimé. Ces produits seront donc soumis au taux normal de 20 %.
Autre mesure de taux
Est également à relever l’application du taux de 5,5 %, à compter du 1er octobre 2025, à la fourniture et à la pose des installations d’autoconsommation photovoltaïque jusqu’� 9 kilowatts-crête dès lors qu’elles répondent à des critères, définis par arrêté, permettant d’atteindre tout ou partie des objectifs de consommation sur place, d’efficacité énergétique et de durabilité ou performance environnementale (LF 2025, art. 42).
OBLIGATIONS ADMINISTRATIVES ET COMPTABLES
Suppression de l’auto-certification des éditeurs de logiciels comptables (LF 2025, art. 43)
Tout assujetti à la TVA qui effectue des livraisons de biens et des prestations de services à destination de clients particuliers et qui enregistre les règlements au moyen d’un logiciel ou d'un système de caisse est tenu, en vue du contrôle de l'administration fiscale, d'utiliser un logiciel ou un système satisfaisant aux conditions d'inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d'archivage des données (CGI, art. 286, I, 3° bis). Le respect de ces conditions peut être justifié par un certificat délivré par un organisme accrédité ou bien par une attestation individuelle délivrée par l'éditeur conforme à un modèle fixé par l'administration (BOI-LETTRE-000242).
Afin de lutter contre les logiciels de caisse permissifs favorisant la fraude à la TVA, la loi supprime la possibilité de justifier de l’utilisation d’un système ou logiciel conforme par une attestation émanant de l’éditeur lui-même. Seule une certification délivrée par un organisme accrédité par le Comité français d'accréditation (COFRAC) ou un organisme européen équivalent est désormais admise à titre de justification.
Cette mesure entre en vigueur dès le 16 février 2025 (lendemain de la publication de la loi). Le certificat d’un tiers accrédité (NF525 Infocert ; certification LNE) doit donc en principe pouvoir être produit dès cette date, sous réserve »å’u²Ô±ð éventuelle mesure de tolérance administrative, non annoncée à ce jour.
On rappelle que l’administration fiscale dispose »å’u²Ô±ð procédure spécifique pour contrôler la détention du certificat (LPF, art. L. 80 O ; BOI-CF-COM-20-60) et que le défaut de production du certificat est sanctionné par une amende de 7 500 â‚� par logiciel ou système de caisse concerné (CGI, art. 1770 duodecies).
Régimes d’imposition
- Régime de la franchise (LF 2025, art. 32)
Le régime de la franchise en base de TVA, qui a été réformé par l’article 82 de la loi de finances pour 2024 avec application au 1er janvier 2025 (conformément à la directive UE/2020/285 du 18 février 2020 visant à harmoniser au sein de l'UE les règles applicables aux petites entreprises), fait l’objet »å’u²Ô±ð modification concernant sa limite d’application, afin notamment de la rapprocher des limites fixées par les autres États membres : les quatre plafonds existants (en fonction du secteur d’activité et du type d’opérations réalisées) sont remplacés par un plafond unique de chiffre d’affaires de 25&²Ô²ú²õ±è;000&²Ô²ú²õ±è;â‚� au titre de l’année précédente et de 27&²Ô²ú²õ±è;500&²Ô²ú²õ±è;â‚� au titre de l’année en cours.
Selon les termes de la loi, cette disposition (qui a été validée par le Conseil constitutionnel) s’applique en principe dès le 1er mars 2025. Le Gouvernement a toutefois annoncé l’ouverture »å’u²Ô±ð concertation avec les entrepreneurs concernés et la suspension de la mesure jusqu’Ã� l’issue de cette concertation (Minefi, communiqué n° 121, 6 février 2025).
- Régime simplifié d’imposition (RSI) (LF 2025, art. 38)
À partir du 1er janvier 2027, le régime simplifié d'imposition (RSI) en matière de TVA sera remplacé par un régime déclaratif trimestriel.
Les conditions d’application de ce régime sont alignées, dans leur principe, sur celles du nouveau régime de franchise (notamment en ce qui concerne la fin du régime en cas de dépassement du plafond). La limite d’application du régime est fixée uniformément à 1 M�, en cohérence avec les pratiques des autres États membres de l’UE, sans distinction selon la nature de l’activité et sans exclusion de secteurs d’activité.
Les entreprises concernées seront intégrées au dispositif de pré-remplissage des déclarations (e-reporting).